La fêtes… des gens qu’on aime.
Je suis tombée sur une photo que quelqu’un avait partagé sur Facebook, je ne la retrouve pas mais c’était un petit mot de la part d’une maitresse de maternelle adressée aux « parents » de ses élèves. Elle leur écrivait qu’au vu des situations familiales compliquées d’un certain nombre d’élèves, ils ne célébraient pas la fête des mères à l’école, mais la fête des gens qu’on aime. Ainsi au lieu de fabriquer un collier de coquillettes pour leur maman, chaque enfant a le droit de fabriquer deux cadeaux, pour les deux personnes qu’il aime. Vous l’avez compris, le petit garçon qui a perdu sa maman ne vit pas un enfer, la petite fille qui a deux papas, ne se sent pas comme le vilain petit canard, et l’enfant adopté ne rencontre pas sa première crise existentielle bien trop tôt. Parce qu’un enfant est émotionnellement intelligent, bien davantage qu’un adulte car contrairement à nous, il n’a pas forcément encore appris à se mentir à lui même.
J’ai été très touchée par ce petit mot. Au delà de la prévenance, de l’intelligence et la douceur dont fait preuve cette maitresse, j’ai été particulièrement touchée, parce que je me suis souvenue en lisant ce mot, que la fête des parents a toujours été source d’angoisse pour moi. Je ne savais pas mettre des mots sur ce sentiment, sur cette morosité que je ressens toujours, depuis petite, et qui ressemble fortement à la mélancolie que je ressens depuis quelques années à l’approche de Noël. Mais aujourd’hui je sais pourquoi je ne tiens à appeler personne pendant les « fêtes de ». Parce que ça me demande de me rappeler malgré moi une partie d’enfance dont je préférais me détacher. Ce que je sais, c’est que suite à ce petit mot j’avais envie de venir par ici, partager un peu tout ça avec vous.
Du coup j’ai voulu regarder un peu l’origine de cette fête, et grâce à Wikipedia je peux vous dire que la fête des mères est une tradition qui avait déjà lieu dans la Grèce Antique en l’honneur de la grande mère des dieux, la mère de Zeus, ou qu’on a pu repérer sous plusieurs formes au cours de l’histoire, toujours au moment du printemps, une période placée communément sous le signe de la fertilité.
Je peux aussi vous dire qu’en France, la fête des mères apparait après la première guerre mondiale en vue de célébrer les mères ayant perdus fils et mari au combat. En 1929, le gouvernement entreprend une politique nataliste et officialise alors une journée des mères.
La fête des mères que nous célébrons aujourd’hui n’est donc initialement pas une invention culturelle comme j’aurais pu le penser.
Quelle que soit son origine, aujourd’hui la fête des mères est une occasion pour tous les enfants de remercier leur mère, de leur manifester leur amour, que ce soit à l’aide d’un « je t’aime » ou à travers un présent, quand dire je t’aime reste trop difficile.
Vous avez remarqué que lorsqu’on évoque la Saint-Valentin on entend toujours ici ou là quelqu’un reprocher à tous ces amoureux et tous ces coeurs partout, de déprimer les personnes célibataires ? Chose que je comprends, on est tellement inondé de publicités, de coeurs, de fleurs, de clichés, qu’en étant célibataire ou mal dans son couple, on peut sentir son coeur pincer, on peut envier les autres qui semblent porter tout le bonheur du monde sur leurs épaules.
Cela étant dit, la Saint-Valentin est une fête qu’on ne nous impose pas. En arrivant au travail le matin notre boss ne va pas nous demander de fabriquer une lettre en forme de coeur géante pour l’offrir à notre amoureux en rentrant le soir.
A l’inverse on est tous obligés de célébrer la fête des mères, dès l’école primaire on n’y coupe pas, qu’il s’agisse d’un collier de coquillettes encore collant, d’une carte mal découpée avec amour, d’écrire un poème avec de jolies ratures…
Ce qui est adorable pour la plupart des enfants, ce qui part d’un bon sentiment pour rendre hommage à ces femmes qui se sont sacrifiées, est malheureusement, vue sous un autre angle, une source d’angoisse pour pleins d’autres enfants.
C’est délicat d’écrire cela aujourd’hui, sur un blog, quand plein d’autres blogueuses rendent hommage publiquement à leur maman, ce que je trouve vraiment très mignon. Mais la fête des mères a toujours été un peu compliquée pour moi, et en 2016 je ne me mouille pas trop si je suppose que vous êtes surement suffisamment nombreux dans le même cas que moi, pour que je décidé d’écrire un article comme celui-ci. Car même si cet article ne respire pas la joie de vivre comme pourrait le faire un joli article de fête des mères, je pense qu’il pourra être tout aussi utile.
De manière générale toutes les conventions autour de la famille m’ont toujours fait me sentir à l’écart, quand elle ne m’ont pas blessée.
Et encore une fois je ne dois pas être la seule. Depuis une trentaine d’années et encore plus particulièrement ces dernières années, les liens familiaux se sont considérablement complexifiés, tout comme les rapports affectifs, qui ne sont plus conventionnels. Les rapports ne sont plus « normaux » donc les soumettre à des normes et des inventions politiques ou culturelles datant de plus de 50 ans, devient compliqué.
Car les liens du sang ne définissent plus les liens « normés ». Entre les adoptions, les inséminations artificielles, les couples homosexuels, la professionnalisation des mères avant reléguées au foyer par défaut, les abandons, une mère n’est pas forcément une « maman ». Un père, à savoir un géniteur, n’est pas forcément un papa, et ne mérite pas forcément qu’on le remercie pour quoi que ce soit.
Avec la complexité des familles actuelles un cousin peut être plus proche qu’un frère, un beau-père peut devenir plus important qu’un père biologique, une grand-mère peut élever ses petits enfants comme les siens, jusqu’à se demander s’il existe une différence finalement. On peut aussi avoir 2 mamans.
Au final ce qui se passe dans ma tête est compliqué, ma vie de famille est compliquée, c’est pourquoi j’ai toujours aspiré à plus de simplicité, à être « comme tout le monde » (si on peut encore dire ça) et à étouffer toute complication.
Mais il faut accepter les complications et y faire face en prenant du recul. Je suis qui je suis aujourd’hui notamment à cause ou grâce à ces complications, c’est ce qui fait ma différence. Vous savez si je critique tant les normes, choses qui peut être agaçante à la fin, ce n’est par esprit rebelle de contestation à la con. C’est juste que les normes m’ont souvent fait souffrir, parce que je n’ai pas une vie « normale ». J’aime croire que je n’ai pas une vie anormale pour autant. J’aime plutôt croire que j’ai une vie hors-normes, parce qu’elle sort de l’ordinaire après tout..
Alors si je me débrouille bien, elle peut peut-être devenir extra-ordinaire, qui sait ?
Bonne fête à toutes les mamans évidemment, mais je finirai en souhaitant surtout bonne fête à tous les gens qui apportent beaucoup d’amour à un enfant qui en a besoin.
Et vous ? Que pensez-vous de tout ça ? Même si vous êtes avec votre maman et que tout se passe pour le mieux je parie que vous avez un avis sur la question :)
Cet article n’était pas du tout prévu, rendez-vous plus tard dans la journée pour un article cuisine, une recette d’assiette végétarienne qui devrait vous plaire ! Des bisous.
PS « je vous vois venir » : Tout ça ne veut en aucun cas dire qu’il faut supprimer la fête des mères, ou que je suis contre toutes les conventions c’est simplement une réflexion et une remise en contexte hein.
Anaïs L.
Magnifique article, comme toujours :) Merci pour tout cet amour que tu donnes autour de toi.
Peut-être est-ce cela que tu cherches ? : https://www.facebook.com/lefigaro/posts/10153825835611339
On se revoit au prochain article, culinaire à ce que j’ai pu comprendre ;) Ça tombe bien, avec ce temps d’automne, un peu de réconfort est le bienvenu :)
Lucille
J’ai aussi ete TRES touchée par ce petit mot de la maîtresse que jai aussi vu passer sur FB ! Une superbe idée car comme tu le dis si bien Cest un sujet très délicat …
Belle journee et jai hate de voir tes recettes végétarienne !
Solène
J’aime beaucoup l’idée de privilégier une fête des gens qu’on aime, moins de personnes sont mis à l’écart comme tu l’as si bien évoquée !
xoxo
Lip'n blush
J’ai vu cet article sur Facebook également et j’ai beaucoup aimé l’initiative (beaucoup moins les commentaires gerbants qui l’accompagnait malheureusement). J’ai la chance d’avoir encore ma maman, avec qui je suis proche et je ne me vois pas ne pas lui souhaiter sa fête. J’ai perdu mon papa en revanche, mais au college et à ce moment là on ne fabriquait plus rien pour les moments. Je salue vraiment le geste de cette institutrice, dans un monde ou une famille n’est plus constituée que d’un papa et d’une maman mais d’une multitude d’individus à aimer. Ce serait vraiment bien que ce soit généralisé je pense, mais vu les commentaires haineux à son égard ce n’est pas prêt d’arriver… triste monde. Heureusement que des personnes comme elle existe encore, cela met du baume au coeur toute cette bienveillance.
Alizée
C’est un très bel article et je pense que beaucoup de personnes sont de ce même point de vue..
En tout cas ne t’en fait pas pour ta vie pas « normale »… aucune vie n’est normale car propre à chaque individu…après il y a ceux qui se voile la face pour rentrer dans les clous de la société mais ne pas assumer qui l’on ait ne nous rend pas heureux…
Bravo à toi qui vis ta vie comme tu le penses ! ;)
Aurore
« C’est juste que les normes m’ont souvent fait souffrir » cette phrase résonne malheureusement trop bien en moi, pas pour la famille de ce côté là, je suis plutôt dans la norme mais pour plein d’autres choses. Et ce besoin de normes m’énerve profondément d’autant plus depuis que j’ai découvert qu’il s’agissait de quelques choses de bien français. Quand tu regardes les comparatifs interculturels, on peut voir distinctement que la France est une société très normé en comparatif aux autres sociétés occidentales, notre besoin de normes se rapproche de sociétés dit traditionnels. C’est dû à notre côté très pessimiste et anxieux, pour compenser on a dû mettre en place des normes, des règles, la paperasse dans l’Administration en est le parfait exemple. Mais du coup il y a clairement un rapport à la différence à revoir. Je suis désolé, je me suis pas mal éloigné du sujet de ton article, et j’espère que mon message n’est pas polémique mais c’est clairement quelque chose qui me pèse depuis toujours. Et c’est notamment quelque chose que j’ai ressenti en devenant végétarienne par exemple il y a un an, pour faire le lien avec ton futur article ! ^^
Isabel
Bonsoir ! j’ai vu ce petit mot sur le Facebook aussi et j’ai trouvé la démarche de cette maitresse pleine d’attention et de tendresse pour ses petits loulous ! j’ai fêté aujourd’hui la fête des mères avec ma maman mon père mon frère ma belle sœur et Petite Chérie ma nièce et j’ai conscience que j’ai beaucoup de chance d’avoir une belle famille unie et encore « entière » mais j’ai eu aussi une pensée pour toutes les mamans qui partent toujours trop tôt et tous ces enfants petits et grands qui aujourd’hui ont du ressentir une si grande tristesse et un grand manque et pourquoi tous les autres enfants qui ont une maman deux mamans un papa deux papas ou tout autre adulte qui leur apporte présence et amour ne pourrait pas aussi connaitre un joli moment en offrant leurs petits cadeaux ! Alors oui je dis a fond pour la fête des gens qu’on aime ! et toutes les vies sont normales quand on est un enfant et qu’on a une vie remplie d’amour peut importe qui et combien l’offre de l’amour c’est la seule chose qui compte !
dollyjessy
Merci pour ton commentaire adorable Isabel !
Alixe ~ A dreamy bird
Merci pour ce très bel article qui invite à réfléchir sur certaines choses comme l’évolution de la famille et la place de l’enfant au sein de celle-ci.
Comme tu le dis si bien, les liens familiaux ne cessent de se complexifier dans une société où les normes familiales restent fortes et tardent (selon moi) à évoluer.
Fêter non pas seulement les mères mais tout ceux qui contribuent au bonheur de l’enfant me semble donc être une très belle idée, qui aidera (je l’espère) chaque enfant à profiter pleinement de cette journée.
Belle journée à toi,
Alixe ~ A dreamy bird
dollyjessy
Je suis ravie que l’article te plaise, merci à toi pour ton commentaire, j’espère à très vite Alixe.
Sarah EtCetera
C’est un très bel article que tu as écris ♡
Je n’ai pas une situation familiale compliquée, au contraire. Et pourtant j’ai moi aussi été touchée par l’initiative de cette professeure des écoles, pleine de bienveillance et de tolérance. Il est important de rappeler qu’aujourd’hui plus encore qu’il y a quelques années, il n’existe pas de situation « normale », chaque situation mérite le respect. Et je pense que généraliser cette « fête des gens que j’aime » pourrait être une belle initiative :)
dollyjessy
Merci Sarah ! On est d’accord :)
F@îtes des Mères | jbl1960blog
[…] pourquoi ne pas transformer cette fête devenue exclusivement commerciale, il faut bien le dire, en Journée des gens qu’on aime, dans un premier temps, afin de ne pas heurter les âmes sensibles qui ne […]
Céline
Coucou Jess’,
J’aime la simplicité de cet article, il est très bien écrit.
Je suis jeune maîtresse (1ère année), et je t’avoue que ce message, quand je l’ai vu, m’a enchanté. J’ai « suivi » les directives des enseignantes référentes des classes que j’ai à charge uniquement 2 jours par semaine, c-a-d fabriquer au moins une carte (voire apprendre un poème…). J’ai de la chance de ne pas avoir de situations « compliques » dans mes classes, du coup les cartes sont très bien passées. En revanche, je pense que lorsque j’aurai mes classes à temps complet à l’avenir, je changerai ces « normes » pour fêter les gens qu’on aime si situations compliquées il y a… Je trouve que c’est un bon moyen pour drédramatiser certaines situations délicates et pour l’élève, et pour l’enseignant qui ne se voit pas entendre « et moi j’ai pas de maman, je fais quoi ? »
Des bisous Jess!
Céline
Manaellee
Ton article est très touchant, et je pense tout à fait comme toi. Dans mes élèves il y a tellement d’enfant qui ont des familles compliqués, voir pas du tout (notamment un élève syrien, qui a perdu sa famille il y a très longtemps pendant les guerres) et mon vécu m’incite aussi a faire de la « fête des mères » une « fête des gens qu’on aime ». Pour l’instant je ne suis que stagiaire, mais dès l’année prochaine ou j’aurai la responsabilité de décider de tout cela, on ne parlera pas de la fête des mères, mais de la fête des gens qu’on aime. Même si au collège ou au lycée c’est un peu différent (j’enseigne dans le secondaire) certain professeur aime revenir dessus, proposer des activités en lien avec cela. Une collègue prof de français a proposé d’écrire un passage autobiographique ou les élèves devaient parler de leur maman… J’ai trouvé l’idée vraiment « horrible ». Certes ça fait travailler directement l’autobiographie, mais je ne toucherai jamais à ce sujet là. Il y a tant de personnes sur qui je n’aurai pas pu ou pas voulu écrire, je pense que c’est vraiment difficile d’imposer quelque chose qui touche le coté affectif et familial puisque comme tu l’as si bien dis, maintenant on a plus souvent affaire à quelque chose de compliqué, même si bien entendu ce n’est pas le cas de tous…
Gwen
Tu m’as beaucoup fait réfléchir avec cet article, mais apres réflection je pense qu’il faut effectivement faire évoluer nos « traditions » quant à ce genre d’événements. Le monde change et nous devons nous adapter à ces changements. C’est pourquoi le concept de « la fête des gens qui nous aident à grandir et nous construire » serait beaucoup plus adaptée (avec un nom un peu moins à rallonge bien sûr -_-).
Il ne faudrait pas rendre malheureux tous ces bouts de choux et leur faire croire qu’ils sont « anormaux » alors qu’en fait ils sont juste issu d’une toute nouvelle génération et que la normalité n’est plus ce qu’elle était. D’ailleurs je pense qu’il n’y a plus vraiment de normalité aujourd’hui (chose que je trouve plutôt cool au final).
Bref bel article qui fait, une fois de plus, réfléchir et franchement j’adore ca !!
Des bisous
Peggy Wild
Bonjour,
Je trouve ton message 3 ans plus tard, et il est encore tellement d’actualité…. je suis enseignante en CP et je ne fais pas la fête des mères et des pères mais la fête des gens qu’on aime…. on a eu des commentaires bien désagréables de certains parents l’an dernier!!! Mais ce n’est pas possible pour moi de faire ça à mes élèves! Mes enfants ont perdu leur papa il y a deux ans, ils sont grands maintenant, au lycée, mais si à l’école un enseignant leur avait fait faire un cadeau de la fête des pères (« c’est pas grave, tu le donneras à papi! »), je lui aurais arraché les yeux….. donc on fait la fête des gens qu’on aime et tant pis pour les haineux!! ;-)
Merci et bonne continuation
Julia P.
Bonsoir.
Je tombe sur votre article 4 ans presque jour pour jour après son écriture. Je suis la maîtresse qui a été écrit ce petit mot relayé sur les réseaux sociaux :) Pour dire vrai, nous étions 6 enseignantes à l’époque dans notre petite école girondine à avoir écrit et engagé cette initiative. Initiative qui n’était même pas dans l’air des nouveaux schémas de familles. Nous voulions tout simplement permettre à tous les enfants de s’engager dans un projet sans se sentir angoissés, angoissés d’être
obligé de créer un objet pour un papa qui n’est plus là ou à contrario de ne pas pouvoir offrir une carte à sa tatie de cœur qui remplace malheureusement une maman partie trop tôt en début d’année scolaire. Ce soir, je me suis remémorée cette événement devenu médiatique à notre échelle et j’ai voulu relire les commentaires positifs du net (laissons de côté les aigris et politiciens qui ne m’ont pas affectée même 4 ans après). Merci pour votre article très touchant, merci pour vos mots qui résonnent encore plus aujourd’hui dans mon cœur de maitresse.
Chris
Bonjour Julia P, je découvre cet article 5 ans après sa parution et après votre mot bienveillant pour les parents d’élèves. Malheureusement 5 après cet article n’est plus disponible sur facebook. Accepteriez vous de le repartager ici svp afin que je puisse m’en inspirer pour ma classe de CE1 avec plein de profils familiaux différents et si riches pourtant. Merci d’avance