Eternel recommencement
C’est l’été 1998, dans 1 mois j’entre en sixième, j’ai hâte. J’attends cette rentrée avec tant d’impatience, je m’imagine en boucle, comment sera ce premier jour, j’imagine mes nouveaux vêtements achetés pour l’occasion, mes nouvelles fournitures scolaires « de grand », mon premier vrai sac d’Ecole. Je ne suis pas une petite fille qui demande qu’on lui achète tout le temps des trucs, ma mère a très peu d’argent, mon père, qui l’a quittée quand j’avais 5 ans, roule en Mercedes, mais lui verse une pension ridicule, quand il se de décide à la verser ; j’ai rarement les yeux plus gros que le ventre, les caprices c’est pas vraiment mon truc, quand je serai grande je gagnerai de l’argent et je me rattraperai (ce que j’ai fait). Mais j’ai 11 ans, je suis une gosse, j’envie parfois ce que les autres enfants se font offrir… Je viens de devenir amie avec une autre Jessica de l’immeuble, un après-midi sa grand-mère l’emmène acheter ses fournitures scolaires, comme je suis chez elles je les accompagne.
Je suis surprise quand je vois qu’elles ne vont pas au Cora – nous on achète toujours nos cahiers dans cette grande surface – mais qu’elles se dirigent vers le centre ville. Je ne m’attendais pas à me retrouver dans ce qui m’obsèdera ensuite longtemps, une librairie – papèterie. Cet endroit représentera en effet cette différence qu’il existait entre les gens comme moi, et ces autres. Jessica et sa grand-mère représentaient aussi ces autres, j’avais cru à tord que dans notre HLM on était tous pareil, il se trouve qu’elles, elles avaient de l’argent. En tout cas plus d’argent.
Elle peut choisir ses stylos individuellement, en prendre un argenté, un rose, un doré, avec le montant de deux de ces stylos je peux constituer ma trousse entière. Un cahier de texte là bas, c’est l’équivalent de 30 cahiers de texte premier prix au Cora. Vient le moment du sac à dos… On en voit un magnifique, le plus beau que je n’ai jamais vu, avec un dos matelassé, plusieurs compartiments parfaitement disposés, une couleur bleue légèrement métallisée, et un énorme logo CHIPIE sur le devant, vous savez ce petit chien bourgeois avec un foulard autour du cou. Il coûte plus de 400 francs, l’Euro n’arrivera que 3 ans plus tard, et 400 francs c’est ENORME. Elle l’a voulu, elle l’a eu, on reprend le bus, et il est l’heure de rentrer chez moi.
Ce sac m’obsède, plus les jours passent, plus je me vois avec ce sac sur le dos pour cette rentrée qui approche. Je finis par le demander à ma mère, les primes de rentrée scolaire sont sur le point d’arriver, et même si c’est très cher elle m’emmène au magasin pour me l’acheter. La volonté de ma mère de nous offrir les choses qui nous font briller les yeux, contribuera plus tard aux difficultés financières que nous connaitrons, alors j’adresse en cette rentrée, une énorme pensée aux mères célibataires, celles dont les ex conjoints n’assument pas leur responsabilité, celles qui se retrouveront peut être à souscrire un crédit à la consommation pour joindre les deux bouts, parce que le manque d’argent rend la parentalité si difficile, et que dans notre société portée sur le jugement, la tendance à la culpabilisation tend à nous faire oublier les faits.
L’année dernière j’ai travaillé une scène de « Toutes nos envies » de Philippe Lioret, avec Philippe Lioret, je jouais une jeune mère, qui abandonnée par le père de ses enfants, est citée à comparaitre pour des crédits à la consommations non remboursés, des loyers et des factures impayées. Je n’ai pas eu grand chose à travailler, à l’issu de la scène il m’a demandé si j’avais fait le conservatoire. Non, ahaha j’étais déjà trop vieille pour le conservatoire quand j’ai pu débarquer à Paris, j’avais travaillé la scène parce qu’elle me tenait à coeur, je n’avais simplement rien eu à inventer. Et aujourd’hui c’est une fierté, mon vécu est une fierté, et un outil quand je joue sur scène, aujourd’hui je suis riche et je le sais.
Même si ces derniers temps, face à ma situation professionnelle qui a vacillé faute à ma maladie, l’écart social que j’avais réussi à gérer, me revient régulièrement en pleine figure. Mais j’y travaille ^^
C’est une anecdote qui me touche encore beaucoup aujourd’hui, plus tard j’entrais dans cette même papèterie, j’y achetais mes premiers stylos et carnets, et le jour où je me suis offert un Moleskine, sans regarder mon porte monnaie, je les avais rejoins, ces autres.
En cette rentrée 2019, quand j’ai reçu ce sac Cabin Zero, bien plus gros en réalité qu’il ne paraissait sur le site, je me suis revue glisser mes livres, cahiers et pochettes dans les compartiments de mon énorme sac Chipie. Il me donnait une allure de nerd mais il me faisait encore plus aimer l’Ecole, l’école avec un grand « E », celle qui m’aura permise de les rejoindre, ces autres.
Ce mois-ci avec la team 1 pièce 10 styles, la pièce imposée fut un sac à dos Cabine Zero, il est trop gros pour le porter au quotidien mais il est nickel pour transporter mon matériel photo. Je le voulais en rose pale mais le noir c’est plus simple surtout quand on veut le partager avec son mec pour porter l’appareil ^^
Je porte :
- Sac à dos noir, Cabine Zero
- Un jean American Vintage
- Un top Urban Outfitters, je l’adore je le porte tout le temps et vais me prendre d’autres couleurs (il n’est plus en ligne mais se trouve surement encore en boutique)
- Air Force One blanches – Defshop (offertes par mon copain, pas de partenariat cette fois ;))
- Mini Veste fourrée Ellesse Urban Outfitters (en rupture)
Voilà voilà, j’espère que le retour des mes looks humeur vous plait ! Je vous fais des bisous et vous laisse avec le look des copines :
Le petit monde de Julie // Les dessous de Marine // Mango & Salt // Slanelle Style // La Penderie de Chloé // CannibaleCore // Elza // Justine // Aurélie and Co
DES BISOUS, PEACE, LOVE.
slanelle
Cette anecdote m’a beaucoup touché – merci d’avoir pris le temps de la raconter :)
Sophie
Très beau texte et bravo pour ta nouvelle mise en page
Ju
J’ai vécu la même chose que toi je comprends tellement !!
Léa
Je me retrouve dans ton texte. Quand j’étais en primaire, il y avait cette fille qui achetait tout ce que ma mère m’achetait. Sauf qu’elle, prenait de grandes marques et s’en vantait. Déjà tout petit on comprend la différence. Moi qui était contente d’avoir de jolies nouveautés, n’osais plus les porter une fois que je voyais qu’il y avait la même chose en mieux. On a des mamans fabuleuse qui font tout pour nous et pour qu’on puisse avoir le meilleur.
bain de lumière
quelle plume! un style littéraire à développer . C’est en surfant que j’ai découvert ton blog. Fais tu des collabs avec des photographes pour tes looks ? Si oui, j’aimerai y participer. Tu peux voir mes travaux ici https://www.instagram.com/studiobaindelumiere/?hl=fr
Aiglentina
Très beau texte, bravo !
On est en 2021 et l’air force one blanche, c’est toujours très tendance
dollyjessy
Merci <3